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Nous pensons souvent le chaos comme désordre, tumulte et destruction. Le chaos, est aussi l’état informe, précédant la création du monde. Alors, au fond le chaos ne pourrait-il pas être pour nous force créatrice et force de vie ?

J’ai été interpellée par cette phrase de Nietzsche, découverte dans les écrits du philosophe Alexandre Jollien. Intriguée par son sens et touchée par sa poésie, cette phrase m’est restée en mémoire et m’accompagne depuis plusieurs années.

Etymologiquement, le chaos désigne chez les Grecs anciens le vide préexistant à toute création et qui porte en soi l’univers de tous les possibles. En langage courant, le chaos peut désigner le désordre, les ruines, la destruction, un état de tumulte.

Le chaos est en même temps force de destruction et potentiel créateur

Le chaos m’évoque également le déchaînement des forces de la nature, où tempêtes, ouragans et tremblements de terre apportent potentiellement désordre et destructions. « Après la pluie, le beau temps », et il sera alors temps de nettoyer les dégâts et décombres, puis de reconstruire.

Il en est aussi de certains événements dans nos vies, où nous pouvons avoir la sensation que notre univers familier s’effondre, à la suite de séparation ou de deuil, lorsque la violence se manifeste, sous une forme ou sous une autre… Il arrive un moment, où le chaos n’est plus soutenable et cela nous oblige à réagir, à nous transformer pour sortir de l’insupportable et est ainsi une formidable occasion de renouveau.

Les périodes de changement elles-mêmes peuvent nous faire vivre une forme de chaos. Déconstruire mon ancien moi, identifier ce que je ne veux plus, et faire face à l’incertitude, accepter cet état inconfortable d’un entre-deux, où l’ancienne forme n’est plus et la nouvelle n’est pas encore advenue. C’est un passage obligé, un passage de vide, qui peut être aride et se révéler également fertile, au sens où il contient le germe de ce qui va advenir et qui n’est pas encore prêt à pousser.

Le chaos, c’est la vie

Le chaos, c’est aussi l’imprévisibilité, l’imprévu, l’arbitraire, l’inconnu, l’impermanence qui sont intrinsèques à la vie et sources de peurs. La tentation peut être grande de normer et contrôler afin de réduire ce risque. Dans un premier temps, cela réduit l’anxiété et donne un semblant de rationalité et d’efficacité. Ensuite, trop de contrôles et de contraintes mènent à une situation mortifère. Les tensions accumulées vont conduire à des fissures dans l’édifice et créer maladie, conflits, révoltes. Et ainsi cela va créer inexorablement ce que l’on souhaitait éviter.

Le chaos, c’est la vie ! Accepter une forme de chaos, c’est accepter la vie qui circule !

« Deviens ce que tu es »

Accepter le chaos pour soi, c’est prendre le chemin de son individuation, accepter de déconstruire ce qui nous a constitué, accepter son héritage et en même temps le transformer, le faire nôtre. Prendre conscience de ce qui peut nous aliéner (dogmatisme et idéologie, consommation, loyautés désastreuses…) et le transmuter en énergie créatrice, au service de la vie, au service de plus grand que nous.

Accepter le chaos, c’est prendre le chemin de la créativité face aux événements que la vie nous propose.

« Deviens ce que tu es » est la devise de Nietzsche

Pour aller plus loin
Alexandre Jollien, Eloge de la faiblesse
Irvin Yalom, Et Nietzsche a pleuré
Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra

 

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